L'émergence rapide de la technologie numérique a transformé notre façon de vivre, de travailler et de communiquer. Cependant, cette révolution numérique s'accompagne d'une empreinte environnementale significative entre la fabrication des supports que nous utilisons, le stockage des données et l'usage de nos services numériques. L'éco-conception web émerge comme une réponse innovante pour atténuer l'impact écologique, lancer une véritable démarche de transition environnementale et sociale sur la manière de concevoir les outils numériques, tout en maintenant la création de valeurs fonctionnelles. L'Eco-conception est aussi une opportunité de se différencier de la concurrence avec un service qui se veut plus qualitatif, et plus valorisable auprès de ses partenaires et clients en tant qu'acteur responsable.
Quelques chiffres sur le numérique et l'environnement
Pour bien comprendre les enjeux et l'intérêt grandissant d'adopter une démarche d'Ecoconception Web, voici quelques chiffres sur l'impact environnementale du numérique (SOURCE ARCEP et ADEME) :
- Le numérique représenterait en 2022 au moins 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde et 2,5 % de l’empreinte carbone de la France . Si cette part demeure modeste comparativement à d’autres secteurs, la croissance annuelle de la consommation de numérique (volume de données, terminaux, etc.) doit nous interroger.
- 62,5 millions de tonnes de ressources sont utilisées par an pour produire et utiliser les équipements numériques
- 21 % de l'impact environnemental sur les émissions de gaz à effet de serre concerne la phase d'usage, et 78% sont liées à l'étape de fabrication. Des chiffres qui confirment l'importance des politiques visant à allonger la durée d'usage des équipements numériques à travers la durabilité des produits, le réemploi, le reconditionnement, l'économie de la fonctionnalité ou la réparation.
- Les centres de données (data center) représentent entre 4% et 22% des outils du numérique les plus impactants.
- Selon le pré-rapport de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique du Sénat, les émissions en GES du numérique pourrait augmenter de manière significative si rien n’est fait pour en réduire l’empreinte : + 60 % d’ici à 2040, soit 6,7 % des émissions de GES nationales.
Comprendre l'éco-conception web
L'éco-conception web consiste à intégrer des principes de durabilité dans le processus de développement et de gestion des sites internet. L'objectif est de minimiser la consommation de ressources et d'énergie, tout en optimisant les performances. Cette approche repose sur plusieurs piliers fondamentaux.
1. L'optimisation des ressources
Une grande partie de l'empreinte carbone d'un site web provient de l'infrastructure serveur et de la transmission des données sur Internet. L'éco-conception encourage l'utilisation efficace des ressources en optimisant les images, en minimisant le code et en favorisant la compression des fichiers, réduisant ainsi la demande en bande passante.
Exemple : Utiliser des formats d'image modernes tels que WebP qui offrent une qualité similaire à JPEG ou PNG avec des tailles de fichier considérablement réduites.
2. La sobriété numérique
La sobriété numérique implique de concevoir des sites web simples, épurés et fonctionnels. En limitant les éléments graphiques superflus, les animations complexes et en favorisant une conception épurée, on réduit la charge de travail pour les serveurs et on améliore l'expérience utilisateur tout en diminuant l'impact écologique.
Exemple : Limiter l'utilisation de vidéos en lecture automatique et privilégier les images statiques plutôt que des éléments animés sur la page d'accueil.
3. L'efficacité énergétique
L'hébergement des sites web requiert une quantité considérable d'énergie. En optant pour des serveurs alimentés par des sources d'énergie renouvelable et labelisé Green, qui mettent en œuvre des technologies éco-énergétiques, ce choix contribue à réduire l'empreinte carbone liée à l'hébergement de la solution et des données.
Chez Web^ID par exemple, nous avons choisi pour nos clients un fournisseur d'hébergement qui utilise des centres de données alimentés par des énergies renouvelables, labellisés Santé et labellisés Green.
Les avantages de l'éco-conception web
L'éco-conception web ne profite pas seulement à l'environnement, elle offre également des avantages tangibles pour les entreprises et les utilisateurs.
1. Des performances améliorées
En optimisant la structure et le contenu des sites web, l'éco-conception favorise des temps de chargement plus rapides et une navigation plus fluide. Cela améliore l'expérience utilisateur et peut conduire à une rétention plus élevée des visiteurs.
Exemple : Utiliser des techniques de chargement asynchrone pour accélérer le temps de chargement des pages.
2. Des économies financières
L'utilisation plus efficace des ressources et la réduction de la consommation énergétique peuvent se traduire par des économies financières significatives, que ce soit au niveau de l'hébergement ou de la gestion des ressources informatiques.
Exemple : Mettre en place des politiques de gestion des ressources serveur pour éteindre les serveurs non utilisés pendant les périodes de faible trafic.
3. Une plus forte responsabilité sociale et sociétale
Les entreprises qui intègrent des pratiques éco-responsables dans leur stratégie digitale renforcent leur image de marque et répondent aux attentes croissantes des consommateurs en matière de durabilité. La démarche s'inscrit dans une véritable démarche RSE dans la manière même de produire de manière responsable et raisonnée ses applications web sur-mesure.
L'Ecoconception : une démarche globale
En effet, pour éviter l'effet rebonds négatifs et donner une impression de Greenwashing, l'Eco-conception by Design doit être une démarche globale et prendre en compte tous les aspects du produit :
- Les différentes étapes du cycle de vie produit : réalisation (conception, design, développement), utilisation et fin de vie.
- Les composants du service numérique : matériels, infrastrucures et logiciels
- L'ensemble du parcours utilisateur pouvant avoir un impact direct et indirect
Il est essentiel de garder en tête de ne pas vouloir être parfait dès le début, mais la démarche doit être progressive et itérative. L'important est d'initier le processus et d'accepter que ce sera une construction sur le long terme avec l'ensemble des parties prenantes (de la direction jusqu'aux opérationnels internes et externes).
1 - L'analyse du cycle de vie produit : les étapes
L'analyse du cycle de vie (ACV) d'un produit orienté écoconception est une méthode systématique qui évalue les impacts environnementaux potentiels associés à toutes les étapes de la vie d'un produit, de l'extraction des matières premières à la fin de vie, en passant par la production, la distribution, l'utilisation et la gestion des déchets.
L'analyse du cycle de vie orientée écoconception est un outil puissant pour guider les décisions de conception de produits plus durables et respectueux de l'environnement. Elle permet de prendre en compte l'ensemble des impacts environnementaux tout au long de la vie d'un produit.
Voici les étapes générales pour effectuer une analyse du cycle de vie orientée écoconception.
A.1 - Structuration du projet : définition des objectifs et du champ d'application :
Avant de commencer l'ACV, déterminez clairement les objectifs de votre étude. Quels sont les aspects environnementaux spécifiques que vous souhaitez évaluer ? Quelles sont les limites géographiques et temporelles de l'étude ?
A.2 - Inventaire du cycle de vie (ICV) :
Collectez des données sur toutes les étapes du cycle de vie du produit, y compris l'extraction des matières premières, la production, la distribution, l'utilisation et la fin de vie. Ces données peuvent provenir de diverses sources, telles que les fournisseurs, les bases de données sectorielles ou les études de terrain.
Exemple : Pour évaluer les émissions de gaz à effet de serre liées à la production, collectez des données sur la consommation d'énergie, les émissions de gaz à effet de serre et les déchets générés à chaque étape de la production.
B - Évaluation des impacts environnementaux et interprétation des résultats
Une fois que vous avez toutes les données, utilisez des indicateurs d'impact environnemental : comme les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d'eau, etc. pour évaluer les impacts environnementaux potentiels à chaque étape du cycle de vie.
Exemple : Utilisez des facteurs d'émission pour convertir les données d'inventaire en impacts environnementaux, en tenant compte des caractéristiques spécifiques du produit.
Analysez les résultats de l'ACV pour identifier les points chauds environnementaux, c'est-à-dire les étapes du cycle de vie qui contribuent le plus aux impacts. Cela permet d'identifier les opportunités d'amélioration et d'optimisation.
Exemple : Si la phase de production est responsable de la majeure partie des émissions de gaz à effet de serre, cela pourrait indiquer la nécessité d'explorer des matériaux plus durables ou des processus de production plus efficaces.
C - Prise de décision écoconception :
Utilisez les résultats pour orienter le processus d'écoconception. Identifiez des solutions alternatives et des améliorations potentielles pour réduire les impacts environnementaux du produit.
Exemple : Si l'utilisation intensive de l'énergie est un problème, envisagez des sources d'énergie renouvelable, des processus de production plus économes en énergie ou des matériaux nécessitant moins d'énergie pour être fabriqués.
D - Communication des résultats de l'analyse du cycle de vie et impacts des actions réalisées
Finalement, communiquez de manière transparente les résultats de l'ACV et les actions entreprises pour améliorer l'impact environnemental du produit. Cela peut contribuer à renforcer la confiance des parties prenantes et à démontrer l'engagement envers la durabilité.
2 - Analyse des composants du service numérique : quand l'immatériel cause l'obsolescence du matériel.
L'éco-conception dans le domaine des services numériques nécessite une compréhension approfondie des composants qui contribuent à l'empreinte environnementale du service. La couche immatérielle de mon projet que ce soit des applications, sites web, portails, outil métier, etc, s'appuie sur des composants très matériels : les équipements des utilisateurs finaux (ordinateurs, tablettes, smartephones, etc) et les infrastuctures d'hébergement (data center et réseaux).
Ok Jamy, très bien, mais que puis-faire avec mon projet d'application ou mon logiciel ?
Il faut bien considérer que dès la phase de conception, vous influencez le rythme de renouvellement des équipements et leur consommation. Plus simplement : plus un service numérique est lourd, plus l'utilisateur aura besoin de renouveler son équipement pour continuer à utiliser le service. C'est donc bien la composante immatérielle du produit qui va causer l'obsolescence matérielle. Dans ce cas, adapter une démarche d'Ecoconception de ses applications Web va permettre d'assurer un fonctionnement à plus long terme sur des appareils anciens et des réseaux moins performants, et ainsi réduire l'obsolescence des terminaux des utilisateurs.
La recherche de sobriété : bien identifier les fonctionnalitées indispensables de celles superflux
Quand on sait qu'en moyenne : 45% des fonctionnalités demandées ne sont jamais exploitées, et 70% ne sont pas essentielles, nous pouvons admettre qu'une démarche d'Ecoconception et de sobriété est clairement envisageable. L'intérêt est donc multiple : bien travailler l'UX en amont afin de définir uniquement les fonctions essentielles pour mes utilisateurs et éliminer le superflux permettra de dimensionner un périmètre réduit et adaptée, qui aura ainsi un impact positif tant sur l'environnement, que l'accessibilité, mais également sur le budget ! (et oui 70% d'Economisé, on dit pas non !).
Plusieurs méthodes peuvent aider dans cette recherche de sobriété :
- D'un point de vue fonctionnel : raisonner par features et se poser systématiquement la question des 3U : le service est-il utile ? utilisable ? utilisé ?)
- D'un point de vue technique : se fixer pour objectif de proposer une solution nécessitant un minimum de technologie et par exemple développer sous contraintes (qui favorise également l’accessibilité), viser l’universalité des terminaux supportés par exemple en privilégiant les solutions web, se former au Green code (choix du langage et sobriété des requêtes), utiliser un outil d’évaluation, DevOps automatisation et industrialisation des déploiements, etc.
- Prendre en compte l'utilisateur et son environnement dans sa globalité : définir ou redéfinir son système pour identifier les externalités et le modèle initial, afin de passer d'une démarche de pleins pouvoirs à une démarche plus collaborative avec le client dans la conception de son produit. Voir l'approche de Design Systémique.
Exemples de sites eco-conçus
- The Low Tech Magazine (entièrement Eco-conçu fonctionnant à l'énergie Solaire !)
- Sustainable - WebDesign (Bonnes pratiques d'EcoConception Web, site également EcoConçu)
- Eco-index : il calcule l'impact Carbon d'un site web, mais il est aussi un exemple d'Ecoconception !
Conclusion
L'éco-conception web offre une opportunité unique de transformer nos usages dans une démarche responsable, pour construire un Web 5.0 en un outil puissant respectueux de l'environnement. Les concepteurs web, les entreprises et les utilisateurs ont un rôle essentiel à jouer dans la transition vers un numérique plus durable. En adoptant des pratiques d'éco-conception, nous pouvons contribuer à façonner un avenir numérique plus propre pour tous et pour l'avenir durable des prochaines générations.